Comment survivre au confinement en tant que photographe ? 📸😷

Sommaire

Photographier depuis chez soi c’est possible ?

Comme vous le savez, depuis le 17 mars 2020, le pays entier est confiné.

Cette situation est sans précédent, et chacun essaye de s’adapter, de trouver sa propre technique pour continuer à vivre, et à travailler tout en restant motivé.

Pour les photographes, c’est une première. Nous qui avons l’habitude d’errer à l’extérieur à la moindre occasion avec un appareil autour du cou, rester coincé à l’intérieur peut vite se révéler être un supplice.

C’est pourquoi j’ai décidé de vous donner quelques pistes sur les actions et les projets que vous pouvez réaliser en cette période de confinement !

Trouver des sujets à photographier

La première chose à laquelle nous pensons c’est évidemment de documenter cette période de confinement et de crise sanitaire historique.

Ça me paraît tout à fait normal et logique d’avoir en tête une approche documentaire. Les rues sont vides, la population s’agglutine aux fenêtres, les passants se font rares, tout le monde ou presque porte un masque… Cette situation semble être une aubaine pour photographier le contraste impressionnant entre les lieux toujours bruyants, plein à craquer et le calme plat de la ville désertée pour cause de pandémie.

Mais il ne faut pas se laisser emporter par cette vision des choses. C’est tentant en effet, je ne vous dirais pas le contraire mais ça ne vaut pas le coup de mettre en danger ses proches, et la population par pur égoïsme photographique !

Il y a plein d’alternatives qui ne nécessitent pas de bouger de chez soi, c’est pour vous donner des pistes que j’écris justement cet article.

La difficulté de représenter l’invisible

Le coronavirus dicte nos comportements depuis plusieurs semaines , nos mouvements, nos pensées, notre mode de vie et pourtant, c’est une menace invisible qui plane au dessus de nos tête.

C’est là toute la difficulté d’un tel sujet, il nous file entre les doigts, on ne le perçoit pas directement mais par le biais des discussions, de l’inquiétude qui pèse sur chacun d’entre nous.

« Nous sommes en guerre. » Ce sont les mots prononcés par le président de la république à plusieurs reprises. Si la situation que nous traversons s’apparente à une guerre, cela signifie qu’il y a et qu’il y aura forcément des photographes en première ligne.
Le front a changé mais l’objectif reste le même : documenter l’histoire.

En tant que photographe ta mission c’est de mettre en image cette situation, mais comment ? Comment photographier ce que l’on ne voit pas ?

C’est à toi de trouver ta propre réponse à cette question !

Gardez un angle d’approche personnel

-Se tourner vers l’intérieur

Avant d’exposer des alternatives à la photographie documentaire, je voulais insister sur un point qui me paraît essentiel.

Nous vivons tous le confinement d’une manière différente. Certains d’entre nous sont seuls, d’autres en famille, en maison ou en appartement, en couple ou célibataire. Nous avons tous une vue différente depuis nos fenêtres, balcons, ou même jardins.

Si tu comptes photographier ce confinement, je te conseille d’utiliser ta propre situation et ses particularités comme sujet principal de ton projet photo. Nous ne traversons pas la situation de la même manière, des milliers de photographes vont certainement avoir la même idée que toi, Qu’est ce qui te différencie ? Comment peux-tu apporter ta propre expérience dans ce projet ?

Je t’invite à te poser ces questions.

Quel angle d’approche vas tu choisir ?

Historique ? Scientifique ? Politique ? Documentaire ? Personnel ?

Photographiez vos proches

C’est parti voici les différentes choses que vous pouvez mettre en place pour transformer la situation actuelle en projet photo ! Et on commence tout de suite par l’idée la plus évidente, photographiez vos proches !

Ce confinement est parfois compliqué à supporter mais n’oublions pas que certains ont la chance passer plus de temps avec leur famille. Si vous pouvez traverser cette étrange période et partager ces instants avec des personnes que vous aimez, c’est peut être le moment de les photographier dans leur quotidien.

Trouvez la splendeur dans l’ordinaire

Photographiez vos enfants, la relation que vous avez avec eux, vos parents ou l’évolution de votre couple pendant le confinement.

Mettez à profit le peu d’espace à votre disposition

Tout dépend de chacun mais que ce soit un appartement ou une maison, tous les photographes subissent aujourd’hui une contrainte d’espace dans la réalisation de leur projet.

En temps normal, pour un photographe il peut être bénéfique de s’imposer une contrainte, de temps, de matériel… Mais aujourd’hui, c’est un évènement extérieur qui vous impose cette contrainte.

Acceptez cette contrainte, utilisez la pour nourrir votre créativité.

Évoluer et photographier dans un espace réduit va vous permettre de faire travailler vos neurones et puiser au plus profond de vous même, qui sait le résultat dépassera peut être vos attentes. 😉

Adapter sa photographie à son environnement, c’est ce que vous devez faire aujourd’hui !

Vous l’aurez peut être déjà remarqué mais c’est de la contrainte que naît l’innovation. Ne sous estimez pas la puissance de réaliser les choses sans moyens.

La créativité fonctionne au mieux quand on a des contraintes.

Quand est ce que vous avez changé la décoration pour la dernière fois, la disposition de vos meubles ?

Déplacez vos meubles, considérez votre habitation comme un studio, apprenez à gérer l’éclairage artificiel.

S’utiliser soi même comme sujet principal : L’Art de l’autoportrait

L’idée la plus populaire après celle de documenter les rues est sûrement celle de l’autoportrait. Ces dernières semaines, je vois fleurir des milliers d’autoportraits sur les réseaux sociaux, allez jeter un coup d’oeil pour vous inspirer !

L’avantage de l’autoportrait c’est d’être son propre sujet. Vous n’avez besoin de rien d’autres qu’un brin d’imagination, d’un appareil et de vous même.

Point matériel 📷 : C’est mieux d’avoir un trépied et de quoi déclencher son appareil à distance, que ce soit une télécommande, un retardateur ou une fonction wifi intégrée.

Voici un exemple de projet créé autour de l’autoportrait et de la question de l’identité.

La photo ci dessous s’intitule « Selfportrait at 17 years old », Gillian Wearing s’est photographiée en reconstituant son apparence et ses vêtements à 17 ans alors qu’elle en avait en réalité 40 lors de la prise de vue.

Utiliser un vidéo projecteur

De son côté Richie Lem, s’amuse à projeter des images sur son mur grâce à un vidéo projecteur et à s’intégrer dans des scènes de film ou des photographies qu’il affectionne.

C’est original et décalé mais réussi !

https://www.instagram.com/richielema/?hl=fr

Transformer sa fenêtre en observatoire

La première chose que l’on peut remarquer lorsque l’on se déplace à l’extérieur pour aller faire ses courses c’est le nombre inquiétant de personnes nous dévisageant derrière chaque fenêtre. La fenêtre est devenue un élément central de cette période de confinement. C’est elle qui nous relie au monde extérieur, c’est elle qui nous apporte un brin de fraîcheur. À l’heure ou toutes les portes d’entrées sont fermées à clé, la fenêtre elle laisse passer l’air frais du monde que nous rêvons de rejoindre. Le moindre individu à l’extérieur devient alors un sujet d’observation et d’intrigue. Que fait-il ? A-t-il une attestation sur lui ?

Chaque balcon se transforme en poste d’observation. Le travail habituel du photographe est de sélectionner un cadre dans le monde réel. Aujourd’hui le cadre, c’est celui de vos fenêtres. C’est à ce moment que tous ceux qui ont une vue inintéressante s’en mordent les doigts.

Je vous propose un petit défi photographique :

Photographiez toujours du même point de vue. Celui de vos fenêtres

Je sais que ce n’est pas le sujet le plus original et que certains photographes se sont déjà attelés à la tâche mais attendez. Il y a une raison à cela !

Je vous propose de combiner toutes ces images, partir du même décor celui que vous voyez depuis votre fenêtre puis photographier tous les sujets qui semblent intéressants et les regrouper dans une seule et même image.

De ce fait vous vous retrouverez avec une image chaotique pleine de sujets qui ne se seront en réalité jamais croisés. À l’heure ou les rues sont vides et les passants se font rares vous pourrez tous les regrouper dans une image, tous ceux qui sont passés devant chez vous ! Ça vaut le coup d’essayer n’est ce pas ?

Prolongez vos images par des réflexions écrites

Dans certains cas, la photographie à elle seule ne suffit pas à exprimer l’intégralité du propos de l’artiste.

Mélanger l’écriture et la photographie est un moyen à utiliser pour refléter les pensées et les réactions que nous avons tous pendant cette période de confinement.

N’hésitez pas à compléter votre série par du texte si vous en trouvez la nécessité.

Écrivez ce que vous ressentez, ce qui a changé depuis le premier jour, comment la situation évolue pour vous.

Plongez dans vos archives à la recherche de la matière d’un futur projet 🏊‍♂️

Parfois, ce qu’on recherche se trouve juste sous notre nez. Je suis sûr que c’est déjà arrivé à tout le monde de chercher son portable pendant des heures pour le retrouver dans le creux de sa main, de passer un temps fou à chercher une paire de lunettes qui se trouvait juste sur votre front.

Dites vous que pour tirer le maximum de bénéfices de cette situation de confinement, il ne faut pas aller chercher trop loin, peut être que les réponses que vous attendez se trouvent juste ici, dans vos archives.

L’édition est l’une des parties les plus importantes du travail du photographe si ce n’est la plus importante. Nous avons tous tendance à accumuler de la matière photographique. Sortie après sortie, mois après mois, les pellicules s’empilent, les disques dur se remplissent et s’entassent…

Voyez l’édition comme un filtre, c’est vous qui mettez à jour les conditions de son fonctionnement grâce à votre taux d’exigence envers votre travail. C’est le devoir du photographe de ne garder uniquement que la minorité d’images qui valent la peine d’être montrées, imprimées et pourquoi pas exposées.

Un photographe est aussi bon que sa photographie la plus faible.

Il ne tient qu’à vous de ne laisser passer que des photos fortes qui s’intègrent parfaitement à vos projets et transmettent avec justesse votre propos.

Parmi toutes les photos que vous avez prises, il y a forcément une perle à côté de laquelle vous êtes passés. Cette perle n’attend que vous la retrouviez et que vous l’imprimiez. Il y a forcément une piste qui vous mènera à la réalisation de votre projet.

Fouillez, creusez, imprimez, éditez, recadrez.

Faites le ménage et éliminez le superflu 🗑

Sur le terrain je vous interdit de supprimer les photos que vous venez de prendre, vous pourriez effacer par erreur la photo que vous attendiez depuis longtemps, mais une fois face à votre disque dur c’est différent.

En général, quand on photographie, à la prise de vue, on laisse passer beaucoup de « déchets ». Des images complètements ratées, des moments d’inattention ou nous avons appuyé par erreur sur le déclencheur.

Cette période de confinement nous laisse le temps de les éliminer pour laisser un peu de places aux autres.

Il est temps de développer et trouver votre propre système de classement, pour vous y retrouver le mieux possible. Personnellement, je classe toujours mes photos par ordre chronologique. ( année -> mois -> jour )

Chaque mois il ne me reste plus qu’à déterminer quelles sont les photos que je garde, je réalise alors une première présélection mensuelle. Une fois que j’ai isolé les photos les plus prometteuses, je les répartie dans les différents projets en cours de réalisation qui pourraient les accueillir.

Photographier la rue en restant au chaud à la maison ☕️

Vous êtes entrain de vous dire que c’est impossible, comment photographier à l’extérieur en étant confortablement installé sur son canapé ?

Et bien je vous assure que c’est faisable !

Doug Rickard est un photographe qui construit ses séries à partir de photographies de Google Street View et Youtube. Et il a commencé bien avant le confinement. Il passe la majorité de son temps à naviguer virtuellement dans le but d’accéder à des scènes oubliées, ensuite il photographie sur son écran d’ordinateur.

Google Street View permet de visualiser un panorama à 360° d’un lieu situé sur une voie urbaine ou rurale, sur laquelle aura préalablement circulé un véhicule chargé d’enregistrer les prises de vues.

Ce véhicule ressemble à ça, si vous l’avez déjà croisé il vous a sûrement photographié. Mais ne vous inquiétez pas les visages sont floutés.

Rickard analyse des dizaines et des dizaines d’images de villes pour composer ses séries. C’est une manière intelligente et créative d’utiliser les technologies à notre disposition pour créer une panoplie d’images.

Il réalise donc le même travail qu’un photographe classique, il se promène dans un univers figé à 360° et sélectionne des instants qu’il considère comme intéressants.

Si vous parlez anglais et que cette manière de photographier vous intéresse, ce photographe à réalisé une vidéo sur le sujet. Bonne balade virtuelle !

J’ai moi aussi tenté l’expérience de la street photo virtuelle et voici ce que ça donne :

C’est un bon moyen de faire le tour du monde sans dépenser un centime ! Par contre ne restez pas trop longtemps derrière l’écran, mes yeux en ont souffert !

Utiliser l’univers des jeux vidéo comme terrain d’expression artistique 🎮

L’accès au monde réel nous est interdit alors que diriez vous d’explorer celui de quelqu’un d’autre ?

Si l’on réduit l’acte du photographe au strict minimum, on se retrouve avec seulement deux actions, celle de sélectionner et celle de capturer.

Que ce soit dans un jeu ou dans la réalité le processus est le même, alors en temps de confinement pourquoi ne pas explorer les vastes possibilités que peuvent offrir l’ « In-game photography »?

En quoi cela consiste ? extraire d’un monde virtuel, une perspective, un angle, un sujet et se l’approprier pour en créer une oeuvre à part entière

Je ne vais pas m’étaler sur ce sujet car je pense qu’il mérite plus ample réflexion ainsi qu’un article complet !

Robert Overweg a décidé d’investir ce nouveau courant (néo-picturialisme virtuel) pour exprimer son propos artistique.

La photographie ci dessous provient de sa série ou il met en avant les bugs que l’on peut trouver dans certains jeux vidéos.

Confinés mais cultivés 📚

Quelle meilleure période pour se plonger ou se replonger dans les livres photo, et les monographies de vos photographes préférés.

En temps normal, nous n’avons pas autant de temps pour regarder et étudier attentivement les livres que nous possédons déjà.

Il n’y a pas meilleur endroit pour apprendre la photographie que dans les livres photo ! Se plonger dans la culture photographique va vous permettre de découvrir ce qui a déjà été réalisé, la pluralité des approches, des sujets et vous faire réfléchir sur votre approche de la photographie.

En résumé c’est tout bénéfice pour vous, vous allez découvrir ce qui vous plaît et ce qui ne vous plaît pas, peut être trouver des similitudes avec certains artistes. Imprégnez vous de cet univers prenez des notes et servez vous de vos observations pour développer vos projets !

Je sais que ce n’est pas le moment idéal pour se procurer un livre alors à la place, je vous conseille de vous rendre sur le blog de Thomas Hammoudi qui rédige des articles très complets sur la photographie.

https://thomashammoudi.com/blog/

Photographier l’après coronavirus

Nous sommes aujourd’hui dans l’oeil du cyclone, les chaînes répètent les mêmes informations en boucle, le coronavirus est partout, nous mangeons coronavirus, nous dormons coronavirus, nous vivons sous l’emprise du coronavirus.

C’est un sujet brûlant aujourd’hui mais qui espérons le se refroidira.

Pourquoi pas réaliser un projet sur l’après coronavirus ?

Une fois que les tensions seront retombées, nous pourrons y voir plus clair et photographier les conséquences de cette pandémie sur la population. Nous subissons aujourd’hui des restrictions de sortie, une obligation de nous tenir à distance les uns des autres mais qu’en sera-t-il lorsque tout ceci sera derrière nous ?

Tous les photographes se mettent à réaliser des projets au beau milieu de la tempête mais pourquoi ne pas attendre le calme plat et la prise de recul sur les évènements pour photographier ?

Par exemple recueillir des témoignages ou encore aller à contre courant en représentant les conséquences positives de cet évènement tragique.

L’adversité rapproche. Elle révèle des solutions à des problèmes que nous n’arrivions pas à résoudre.

Comment le coronavirus va-t-il impacter la photographie ?

Il est encore évidemment trop tôt pour tirer des conclusions en ce qui concerne l’impact et l’influence de cette période de confinement sur l’histoire de la photographie ! Néanmoins je suis certain que nos rapports aux autres et à l’environnement vont s’en retrouver bouleverser pendant un moment. Nous qui devons aujourd’hui éviter tout contact avec autrui et maintenir une certaine distance de « sécurité ».

Cette peur de la contamination affectera-t-elle nos rapports sociaux ? Notre façon de photographier ?

L’avenir nous le dira.

Merci d’avoir lu cet article jusqu’au bout ! J’espère vous avoir donné quelques idées pour animer votre quotidien de photographe.

Si vous voulez recevoir plus de conseils sur la création d’un projet photo personnel n’hésitez pas à rejoindre le groupe privé qui reçoit mes emails :

https://youtube.us19.list-manage.com/subscribe?u=7e023c8034ea198b8972516a3&id=f93d95acdb